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Elle refuse toute intimité. Rien ne peut être dit qui la rapprocherait des autres. La blessure doit être vive et je ne la connais pas. Elle se ferme comme une huître à chaque fois que je tente d’en savoir davantage, se précipite à la cuisine et avale n’importe quoi. Il m’a fallu plusieurs mois avant qu’elle ne me délivre son prénom. Loin d’en être fière, elle le cachait dans je ne sais quel écrin au fond de sa mémoire. Les secrets sont pires que des venins. Ils agissent à petit feu, sournoisement, jusqu’aux infimes accents de vie.

Mes mots font l’amour avec le silence, l’un contre l’autre, l’un dans l’autre. Jusqu’à l’ivresse. C’est comme un grain de folie acidulé qui se glisserait sous le désir de la langue.

Les mots se mouillent puis se déposent sur la page, baignés de salive et de larmes. Quand le plaisir se dresse, le saisir et l’emporter en bord de mer. Déguster des coquillages chargés d’odeurs marines. Rajouter un doigt de citron. Les mots ne sont pas toujours conciliants ! Certains râpent, d’autres glissent. Et les yeux se mouillent, eux aussi.

Comme la langue, l’écriture est un corps sensible, un corps à émouvoir. Faire vivre la langue, suivre son désir, comme se savoure une femme. Plaisir du corps et plaisir d’écrire s’expriment dans un même élan. Mot, nourriture et sexe, partagent avec la langue la jouissance et l’affliction de l’amour.

EXTRAITS
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